A l'endroit fixé par les "traceurs" de la Bastide et fidèle aux
dimensions choisies alors, l'église que le visiteur peut admirer aujourd'hui, en haut du
pech, est en fait l'héritage de trois églises successives.
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XIII° Siècle
XVIII° siècle
XIX° siècle |
La première église
construite - l'église Notre-Dame - sort de terre dès la fin du XIII° comme l'atteste
son portail, typique du gothique agenais de ce siècle. Mais la construction de la Bastide
elle-même et des murs d'enceinte ont dû mobiliser suffisamment l'énergie des
bâtisseurs pour que cette église de style gothique ne soit construite que
progressivement, du XIII° au XV°, d'autant plus que l'église matrice Saint André - au
bas de Monflanquin - était, en attendant, en mesure de recevoir les paroissiens.
De cette église Notre-Dame subsistent, essentiellement : la superficie de l'édifice, le
portail, une partie de l'abside autrefois intégrée aux remparts, plus de la moitié de
la chapelle nord, les pans de murs de deux chapelles Sud encore visibles dans les maisons
voisines. En effet, cette église Notre-Dame possédait sept chapelles et une sacristie,
plus amples que les chapelles actuelles. Pour imaginer le tout il faut avoir à l'esprit
l'église de Villeréal.
Les Guerres de Religion avec l'occupation - tout ou partie - de l'édifice, par les
protestants pendant près d'un siècle, les difficultés économiques durant tout le
XVII° font que finalement "les poutres sont pourries et l'on n'ose plus entrer dans
l'église". Au point de transférer les services divins à la chapelle des Augustins
(l'actuel Temple protestant).
Une seconde église va donc devoir être bâtie sur ce
qu'il reste de la première. Au début du XVIII°, les consuls et les habitants de
Monflanquin vont faire les efforts nécessaires à la réussite de cette reconstruction.
Faute de ressources ils doivent se contenter d'une longue nef dont le matériau grossier
jure avec la belle pierre de l'édifice précédent, et la voûte laisse place à des
lambris. Les fenêtres à plein cintre sont toujours visibles dans les murs de l'église
actuelle. Deux chapelles, moins spacieuses que les sept précédentes, sont maintenues. Le
clocher démoli est remplacé par des arcades sur la façade. Cette église du XVIII° est
au demeurant moins haute, comme le révèle la corniche sur le mur extérieur. L'église
Notre Dame a perdu de sa prestance.
La troisième église, que nous avons aujourd'hui sous
les yeux, date du milieu XIX° siècle. Elle conserve les murs des deux constructions
précédentes mais restitue les voûtes, ce qui permet de retrouver globalement le volume
imposant d'origine.. Pour équilibrer ce nouvel ensemble, des fenêtres ogivales sont
percées plus haut que celles obturées .du XVIII°. Les deux chapelles du transept sont
conservées mais légèrement rehaussées, en même temps que sont condamnées leurs
ouvertures vers l'extérieur.
L'harmonium, au-dessus de l'entrée, contribue à l'impression que l'on ressent
d'une église ayant retrouvé une part de sa splendeur de naguère. Les vitraux du
chur ne sont pas étrangers non plus à ce sentiment : le vitrail du haut -
uvre d'un maître verrier de Bordeaux -et les trois du bas - en verre
éclaté - réalisés par les Pères Bénédictins d'En Calcat dans leTarn.
A l'extérieur, le clocher à peine terminé, a été foudroyé. Dès lors, le choix
s'est porté sur un clocher inspiré des églises du Toulousain où la façade fronton est
surmontée d'un mur arcade et de créneaux entre deux tourelles.
A quelques pas de là, la place des Arcades.
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- La place des Arcades
- dans son harmonie associe
- tradition et Modernité
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Harmonie redevable aux proportions de l'ensemble et à la régularité des
dimensions des façades, dans le respect du parcellaire originel, malgré les
modifications liées aux acquisitions dans le temps.
Au centre, l'espace complanté d'arbres, a perdu sa halle. Contemporaine de la Bastide
naissante, fortement endommagée au XVII° par les soldats royaux de passage pendant la
Guerre de Trente Ans, elle ne fut jamais reconstruite. Son esplanade sert de nos jours aux
concerts et spectacles.
A l'origine la place ne comportait pas, semble-t-il, de cornières, mais progressivement
les consuls de la Bastide ont donné aux particuliers l'autorisation de créer ces
avancées sur portique, les plus anciens avec une poutre maîtresse sur des piliers de
pierres, les plus récente agrémentés d'arcades cintrées ou ogivales.
Cette diversité, qui s'intègre parfaitement dans l'harmonie de l'ensemble architectural,
se retrouve tout naturellement dans le matériau des maisons. Pour mieux apprécier, trois
maisons au moins méritent attention :
Au Sud-Est de la place, une maison (longtemps présentée comme du XIII° mais plus
vraisemblablement du XV°/XVI° siècle) avec colombage et briques, le tout supporté par
une poutre maîtresse.
En s'approchant on constate que l'un des piliers de pierres est conçu de sorte que
puisse y être installé un escalier menant directement au Ier étage. Vestige d'une
technique passée.
Sur la façade Ouest, une maison du XIV/XV° si l'on s'en réfère à l'appareillage des
pierres et à la forme des fenestrons bas. Sous son arcade peuvent se voir les
renforcements des piliers où ont longtemps reposé les mesures à grains de la ville.
A l'angle Nord-Est enfin, la maison dite du Prince Noir, dans le cas hypothétique d'un
séjour à Monflanquin pendant la Guerre de Cent Ans. Cependant la facture des nervures de
la cornière laisse à penser que la demeure a été construite vers le XIV° - période
du Prince Noir - imposante tant par sa hauteur que par la qualité de la pierre et
l'élégance de ses fenêtres. Maison d'un représentant du Prince Noir après 1363 ...?
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C'est de cette place qu'est partie la "reconquête" , si l'on peut dire, au
milieu du XX° siècle de la Bastide par ses habitants. Tout a commencé avec le
décrépissage des maisons bordières pour gagner progressivement les rues voisines qui
méritent aujourd'hui un temps d'arrêt.
Le mouvement s'est heureusement amplifié avec la réhabilitation des carrerots rendus à
une circulation agréable, la création de passages faciles entre les deux rues
principales, l'ouverture d'une placette lumineuse greffée sur la rue des Cabannes, la
bibliothèque, instrument de culture si nécessaire à l'orée du XXI°...
Le tout dans le respect des réalités de la Bastide, même quand une touche de modernité
vient s'y glisser. La mairie a su donner l'exemple en mêlant son mur de verre à la
pierre afin de s'ouvrir à la lumière sans oblitérer les grandes lignes du bâti
initial. Signe d'une volonté profonde de lier Tradition et Modernité pour que la
Bastide, tout en prenant en compte son passé, soit un lieu de vie, de mouvement orienté
vers l'avenir.
- Odo Georges
- SLA 1992 n° 320 à 323
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- Itinéraire possible d'une promenade dans la bastide
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